Thursday

it's insane dirait ezra.

6pm et 6 minutes.

je viens de rentrer du 4 à 7 d'hec, une sorte d'happy hour en gros, après avoir rejoint un ami de lycée au tabasco, un bar pas loin de chez moi dans lequel hang out des types de hec, en face de la maisonnée, un autre bar prisé des étudiants de l'udm, j'ai bu une corona, ça m'a changé de la molson dégueu et j'ai vu des gens quoi. au 4 à 7 y'avait vraiment pas mal de meuf bonnes. des meufs moins bonnes ou pas du tout, mais quand même des meufs bonnes. là je suis docilement wasted, je mange des tortillas, j'ai pissé dans mon lavabo (tous les mecs font ça on se calme) après avoir fermé mes rideaux, je les ai rouvert, j'écoute love in stereo des monks qui sonne comme du costello. apparemment j'suis toujours un peu overdressed pour le canada, la chemise et les richelieu c'est too much pour la majorité des gens mais on s'en cogne. j'ai pas parlé à une seule meuf et c'est le sujet ici.

au bout d'un mois en terre étrangère au coeur des ténèbres tout ça je peux dire qu'au fond le plus dur c'est d'être un, d'être inconnu, de n'être personne. jusqu'à maintenant j'ai toujours été dans des petites structures: l'iep, un lycée et un collège privé. moi, vadim, ça voulait dire quelque chose, y'avait un nom associé à mon image, et d'autres trucs associés à ce nom et quelque soit la qualité, disons, de ces associations, c'était toujours un avantage. ici, tout le monde n'en a rien à foutre de moi parce que personne ne sait que j'existe et ça a côté welcome to the reality, wake up call, coup de point dans le bas-ventre, ce que tu veux qui retourne un peu la tête. donc je galère un peu, je sais pas comment je vais me sortir de ça. c'est surement des problèmes de riche (mais j'ai aussi des problèmes de pauvre, j'ai un budget), mais quand je sors c'est un truc qui apparaît parce que je vais pas rentrer dans quelqu'un que je connais ni rien et je suis un peu circonscrit au cercle avec lequel je suis venu et me connaissant je me sens parfois un peu à l'étroit parce que j'aime bien avoir la bride lâche. je suppose qu'il faut simplement que je porte mes couilles.

Wednesday

Don't call me mamacita.

3.20 pm
Ce jour est arrive.
Le jour ou cette phrase : New York I love you, but you're bringing me down, prendrait sens.
Mardi matin, je suis en retard, j'ai des valises sous les yeux, le metro est bonde, je presse le pas sur la 29th en faisant semblant de ne pas entendre le '' hum sexy lady '' des deux mecs assis devant la gallerie d'art en renovation. Brainstorming meeting. On felicite une de mes collegues pour son sublime rapport sur les couleurs de cet hiver, comprenant une tres bonne synthese du rapport Pantone qui est chiant a mourir. Rapport que j'ai lu, synthese que J'AI ecrite. C'est la deuxieme fois qu'elle s'approprie mon travail, cette abrutie tout sourires, toute mignonne. Elle ne savait meme pas ce qu'etait Pantone avant hier.
Je repars a mes 8 comptes twitter en gromellant un peu, je recois un tas d'emails me demandant de faire des trucs debiles comme uploader manuellement 85 photos sur flickr. Le telephone n'arrete pas de sonner, yes can I help you, no she's out of the office, can I ask who's calling ? Journee de travail chiante et frustrante quoi. Habituellement, c'est interessant, excitant, habituellement je dois utiliser mon cerveau et non pas faire attention a ne pas shooter le chien de la super patronne.
Je commence a avoir faim vers 16 heures, pas eu le temps de dejeuner, donc je vais me chercher un truc chez Pret-a-Manger. Un granola w/low fat yogurt et un coca, un rouge, un vrai, pour me recharger en sucre. En degustant mon granola, je decouvre qu'il y a de la banane. Je m'ordonne de la fermer et de ne pas faire la difficile, j'ai faim. Vient le drame : un cheveu dans mon yaourt. Un gros cheveu. Synthetique. Apres le fail professionnel, le fail alimentaire. Je ne sais pas comment j'ai reussi a vomir dans les toilettes et pas sur la moquette.
Le pompon, c'est que celle-qui-me-vole-mon-taf me demande si ca va, et souligne que j'ai vraiment une sale mine - non sans blague, t'as le teint frais et les joues roses apres un degueulis toi ? -

Je n'ai qu'une envie, finir ma journee de taf, retrouver Celine pour deguster un 'shroom burger au Shake Shack, et regarder la superposition de Jupiter et de la Lune sur la High Line.

Quand arrive enfin ce moment beni, ou je clique sur '' Log off Ibtissame '', balance tout mon bazar dans mon sac, et m'echappe en chantonnant '' Have a good night girls ''; la presidente de la boite vient me voir, en me disant '' bah tu viens pas au cours de yoga en salle de conference ? ''; comprendre : '' ramene toi tout de suite au cours de yoga que j'ai organise en invitant gracieusement mon prof, et arrete de mal regarder mon chien, merci ''.

J'essaie de m'esquiver, (je vous arrete tout de suite, je suis relativement sportive quand je le veux, et je suis super souple. Adho Mukha Svanasana - soit le chien tete en bas - ne me fait pas peur) j'invoque le caractere non-pratique de ma tenue, comme quoi je n'ai pas envie de filer mes collants non flexibles, ni d'offrir le spectacle de mon posterieur dans mon short American Apparel. Elle me repond qu'il est joli comme tout, mon posterieur, et que je ferais mieux de le ramener fissa en salle de conference.

Je rencontre le prof, une sorte d'illumine aux liftings multiples. Il se met a raconter tout un blabla introductif explicant que le film Avatar l'inspirait tous les jours, comme quoi son yoga etait tres spirituel, d'une nouvelle sorte.

D'une nouvelle sorte, c'est sur. Il y avait de la musique chelou, des mantras et des chants qu'il fallait reprendre tout en faisant les positions, qui allaient de la grenouille, a l'arbre. Ma favorite reste celle de l'insecte mort, une de ses creations. Il fallait etre sur le dos, secouer nos bras et nos jambes en l'air et fermer les yeux, faire l'insecte mort quoi, et repeter les trucs sans sens qu'il chantait. Il y a aussi eu une periode de meditation. Il chuchotait des trucs, inhale, exhale, oh you're so beautiful, please, seat well on your rectum and you sex organs, and salute the Universal force. Le cours s'est fini sur un blabla a propos de Moise, de Jesus, et de combien le cerveau etait un frein a l'epanouissement et a l'accomplissement personnel. A ce moment la, je me suis vraiment dit que c'etait n'importe quoi. Je pourrais raconter a mes eventuels gosses que j'ai presque infiltre une secte. Tout le monde etait trop heureux, oh, c'etait trop bien, c'etait fabuleux, en plus, on est les invitees a rencontrer le guru du yoga center sur la 25eme.

Pour moi, c'etait plus inhale, exhale, ibtissame, c'est fini, t'as pas file ton collant, et tu n'es pas morte de honte d'avoir fait la grenouille devant tout le monde. Par contre t'as 30 minutes de retard, et 6 appels en absence.

'' RDV au Madison Square Garden ''. Je sors en vitesse, me rhabille en courant, goodbye I'm late, je cours, un bloc et trois rues, le plus vite possible; je ne trouve personne devant le Madison Square Garden. Evidemment, parce qu'en disant Madison square GARDEN, Celine voulait dire Madison Square PARK. 5 blocs et 10 rues plus bas.

Je cours dans l'autre direction, pour arriver le plus vite possible. Je cours, je maudis ce cours de yoga, et cette journee de travail chiante a mourir, et cette abrutie qui me vole mon taf, et les feux qui sont rouges, et les taxis qui manquent de m'ecraser, et mes chaussures qui me sont pas faites pour courir, qui font qu'a chaque pas, l'impact est insupportable pour mes chevilles et mes tibias, et pourtant je dois arriver le plus vite possible. Je maudis le bruit des pieces dans mon sac, je maudis New York et ses arteres bondees, New York et ses Square, et ses Park. Un mec a mon passage sort un '' alalala mamacita corriendo '', je ne trouve rien d'autre a dire que '' fuck you '', donc je cours, en hurlant fuck you a cet abruti, qu'est-ce qu'ils ont a tous m'appeller mamacita, franchement, en plus c'est pas le moment. J'approche le Madison Sq PARK, il y a des tentes, donc je dois faire un detour. J'arrive enfin, et je vois Celine, son petit sourire, avec Juliette. Elles m'ont commande mon truc que je mange, plus pour me mettre un truc dans la bouche et m'empecher de me plaindre.

On s'est trompees de chemin pour aller sur la High-Line, et sur le chemin, je checke mes mails et mon Facebook, l'administration de l'IEP me cherche des poux, en me racontant qu'ils m'avaient envoye un courrier il y a trois jours et que je n'ai pas repondu ohlalalala. La prochaine fois ils devraient essayer de m'envoyer un telegramme, ou un pigeon voyageur, c'est bien plus efficace pour faire parvenir une feuille a signer. J'ai recu 6 inbox dont je ne saisis pas le sens, on marche vite donc je ne peux pas me concentrer et mon telephone est un LG ridicule avec un tout petit ecran, une interface pourrie. J'ai envie de le balancer dans l'Hudson river, mais je ne le fais pas parce que sur le coup, ca me fera du bien, mais apres je me sentirai conne, surtout que je devrais en racheter un autre. Certainement le meme. BREF, ce serait stupide, je ne l'ai pas fait.

Voir Jupiter et ses quatres lunes c'etait cool, je ne comprends pas pourquoi tout le monde voulait absolument voir la Lune et s'en foutait de Jupiter, alors que c'etait cent fois plus cool. Celine etait trop mignonne. Elle etait toute exhaltee. La difference avec moi, c'est que j'etais tellement soulee par cette journee, que mon exhaltation voulait pas se montrer.

Je rentre chez moi, une fille aux cheveux roses delaves me bouscule sans s'excuser. Je la pardonne dans ma grande mansuetude : Tu as peut etre un sac Marc jacobs a chaque bras, mais tu as aussi un trou dans ton pantalon, qui laisse entrevoir ta culotte rose fluo, qui fut un temps assortie a tes cheveux. Il y a une justice sur terre. Dans mon salon, le guido sur le canape, qui me salue d'un '' hey mami ''. Je me retiens de lui crever les yeux, en me disant que c'est la derniere de mes miseres de la journee.

Il n'en est rien. Je me douche en oubliant ma serviette dans ma chambre, realise que mes collants sont files, et DRAME ULTIME : la batterie de mon ordinateur vient de me lacher. Lacher dans le sens '' va chez Best Buy poser $100 pour une nouvelle batterie ''. Je n'ai meme pas pu me complaire un peu en ecoutant LCD soundsystem avant de me coucher.

Heureusement, demain est un autre jour (ca va mieux aujourd'hui).

J'ai vole une feuille de chants et mantras; en voici un extrait : '' Ong namo Guru dev namo. Light of Light, God of God, Light by the way of God, God by the way of Light, Lumen de Lumine, Deum de Deo, Deum de Verum de Deo Vero, Truth is found in the Naam, undying and unborn, self illuminated, he's the light of the Guru ''.

Tuesday

long time no see

seconde partie de "pierre passe une bonne journée à shanghaï".

en fait, ça dépend de l'heure à laquelle j'arrive en cours. parfois, j'ai le luxe d'une cigarette, et je m'assieds dans un de ces grands fauteuils en bois, juste en face de l'entrée, à côté d'un miroir qui sert à toutes les petites brunes à vérifier leurs mèches, encore une preuve que personne n'est vraiment différent. il y a aussi ce type, qui arrive toujours tôt, qui écoute de la musique aussi fort que moi et qui, l'autre jour, avait un tee-shirt mgmt. j'avais bien envie d'aller lui parler, mais il était tôt et il n'y a rien de pire que d'être dérangé quand on écoute un morceau qu'on aime bien avant de commencer une journée de cours. il y a les filles qui montent les escaliers et qui font semblant de ne pas regarder les garçons, et les garçons qui montent les escaliers en regardant les jupes des filles. même après deux semaines de cours, certains s'arrêtent encore devant le panneau d'affichage pour vérifier dans quelle classe ils ont cours. moi, j'ai pris la classe qui ne change jamais de salle (en théorie on n'a pas le droit de choisir sa classe mais c'est une longue histoire), c'est plus simple. généralement, je me débrouille pour mettre un joli gentil morceau de rap quand je me lève pour jeter mon mégot et marcher le long du couloir, genre harder than you think ou house of the flying daggers, ça m'aide à poser mon style.
oui, ça m'aide pas mal parce que, quand je rentre dans la salle, il y a toujours du monde, disons une petite douzaine, la moitié quoi. et ils sont tous super saucés d'être en cours à shanghai et ils vivent pour ces cours et vivent dans la fac et serrent la main à tout le monde à tout le monde en souriant beaucoup même si ils ont une gueule de bois. sauf que j'ai du mal à être communicatif dès le matin, alors je vogue jusqu'à ma table au fond en fixant vaguement le carrelage, et je me dépêche de sortir un livre. là, je lis toujours ulysse, léopold n'en est qu'à l'enterrement, mais je me suis replongé dans lolita parce que je devais le prêter à une allemande, bref. je serre la main aux quelques personnes que je connais, oui, clovis, un français sympa qui est l'archétype (dans le bon sens) d'un président du bde d'une petite mais bonne école de commerce parisienne intra-muros, puis nick, un suisse-italien-argentin qui aime les arctic monkeys et qui regarde des documentaires animaliers quand il rentre chez lui à 5:00am, et andrew, un mexicain inoffensif. et puis une philippine, parce qu'elle est venue vers moi pendant une soirée pour me demander si je parlais, j'ai dit oui, et j'ai parlé et elle a saisi que j'étais pas spécialement bête ou timide, que j'avais juste pas mal la flemme. revenons-en plutôt au fait que je n'ai le temps de lire que deux ou trois pages avant que le prof n'arrive.
on a trois professeurs, dont un prof principal (et quand j'ai dit ça, une larme de nostalgie au coin de mon oeil ému), deux femmes et un mec. le mec, on va l'appeler feichang hao, qui veut plus ou moins dire très bien, excellent (cass-dédi à victoire), parce qu'il dit toujours ça, tout le temps. son record, c'est quatre fois d'affilée. c'est énorme, rendez-vous compte: très bien, excellent, très bien, excellent, très bien, excellent, très bien, excellent. c'est pour ça qu'il est cool, et il met toujours le même polo, ce qui est rigolo aussi, et il a l'air un peu gay, mais juste assez pour laisser planer le doute et juste donner envie d'être pote avec lui. les deux suivantes, c'est un peu laurel et hardy, la grande et la grosse. la grande a une sorte de sourire inversé particulièrement décontenançant, elle ne parle jamais anglais et se contente d'écrire au tableau le numéro des exercices qu'on doit faire pendant une heure et demie. c'est mieux que de répéter ces foutus syllabes, je te l'accorde. la grosse, elle, n'est pas grosse, juste un peu enrobée, et elle est super cool, c'est la meilleure prof principale que j'ai jamais eu, on blague en chinois et la seule chose qu'elle sache dire en francais, c'est "mille mercis", avec une prononciation parfaite, tu peux pas la test. donc voila, elle nous pose des questions sur notre vie réelle (ou est-ce qu'on habite, ce qu'on fait le week-end) et fictionnelle (li da zhong peut-il appeler wang laoshi demain soir ?), et c'est assez interactif pour que je ne sois pas tenté de compter les feuilles de l'arbre en face de ma fenêtre (toi qui croyais que je m'asseyais au fond de la salle pour ne rien foutre, je t'ai bien eu, j'aime avoir une jolie vue quand je travaille, avec un petit étang et des trottoirs et des arbres qui ne vont pas tarder à s'embrunir et à se redorer).
la pause clope, c'est généralement ma pause musique pour eviter de n'avoir rien a dire à des personnes qui aimeraient bien que j'ai quelque chose a dire, mais parfois on discute quand même, et tout le monde est là, les japonais entre eux, les russo-kazakhs entre eux, et les autres mélangés. tout le monde mate un peu du coin de l'oeil la bulgare qui est une blonde superbe sauf moi parce qu'elle discute avec mes potes et que ca lui fera la bite si quelqu'un l'ignore, tiens.
parfois, je marche un bloc jusqu'à la supérette du campus pour acheter des biscuits, ersatz de prince, et du thé glacé au citron, qui me coûtent environ quatre-vingt centimes. et puis retour direct en classe, apres avoir achevé ma clope dans les escaliers (là encore, dédicace émue à tous ceux qui ne peuvent pas fumer dans les escaliers de leur fac), pour une autre tranche de quarante-cinq minutes.
lundi, quand on a aussi cours l'apres-midi, on traverse la route pour s'engouffrer dans le rue du street-food et se gaver de nouilles frites, dans lesquelles il y a de délicieuses choses dont je ne devinerai jamais le nom, après avoir dit bonjour à la vendeuse d'écureuils et de cannetons parce que je veux un putain d'écureuil presque autant que je veux un panda. et puis on va déjeuner devant la statue de mao, parce qu'elle est vraiment foutrement kitsch, et on reprend les cours et je reprends le bus.


voila pour l'article de retard, le prochain sera sur mes apres-midis.

bonne nuit les petits.

Monday

killing it

12.12pm

jeudi soir j'ai manqué la soirée de l'année, comme on l'appelle ici, le party (prononcer parté) deuxième étage qui avait lieu dans l'enceinte de la fac, ce qui pour le concept est ouf, mais y'avait plus de places. je voulais sortir avec sam et bruno mais manque de bol il pleuvait des cordes telles que je suis resté chez moi à mater le college football sur espn.

chez moi, justement, les résidences universitaires, c'est un peu glauque sauviético-prison avec pleins de néons et des murs jaunes pisseux et un babyfoot et un billard en bas, desquels je me suis encore jamais approché avec plein de gens qui ont l'air de s'amuser mais que je n'ose pas aller voir seul. y'a des types qui déclenchent l'alarme incendie 3 fois de suite quand j'essaie de dormir et d'autres qui cuisinent des steaks à des heures indues qui foutent la dalle ou encore un type qui frappe à toutes les portes des chambres à 1 am, black, benêt, et qui cherche maeva, no wonder mec, une fois que j'ai ouvert la porte t'es fixé, à moins que je la planque dans mon pieu.

par rapport au fait de vivre à l'étranger, tu t'en rends pas forcément compte tout de suite, rapport que c'est assez européen. mais par exemple, on trouve ni lardons ni crème fraîche et ça me casse les couilles parce que j'aurais tué pour une carbo. l'autre jour je suis allé acheter des caleçons, et quand je suis passé à la caisse j'ai eu la présence d'esprit de demander si les standards étaient américains ou français. le mec m'a parlé de ma taille de futal, je m'en rappelais pas, j'ai pris des S et grand bien m'en a pris, parce que je flotte presque dedans. welcome to america. autre péripétie, j'ai passé une heure sur une boîte de conserve parce qu'elles n'ont pas de languette d'ouverture facile, et donc je me suis entaillé le doigt au couteau, tout va bien.

sinon je vais à tous mes cours, je fais tout mon taff, big revolution. d'ailleurs, en anglais, ma prof a un strabisme ce qui a donné lieu à cette epic scene où elle voulait interroger ma voisine, à deux chaises à ma gauche, mais où ni elle, ni mon voisin de derrière, et donc encore moins moi ne savait à qui elle s'adressait, scene dont le climax a été son "c'est vous que je regarde" qui est mort dans la perplexité générale. d'ailleurs un de mes camarades ressemble à zach galifianakis et une dans une autre classe s'appelle soprano, ce qui, vu le temps que je passe à mater des séries, a pour moi une importance capitale.

vendredi on est sortis avec sam et bruno. je les attendais devant le pub de polytech, y'avait la musique qui hurlait, helmut fritz, ce qui ne m'a pas rassuré, et je fumais une clope en regardant la musulmane voilée qui attendait dans sa voiture et un panneau en marbre avec une date et des noms qui commérorait le massacre de 14 personnes comme je l'avais suspecté et qui était complètement irréel dans ce contexte de beuverie où les 20 shooters coûtent 21 dollars. après on est devenus saouls, on a bu ma flasque de jack et d'autres shots de jack et de la bière et on a discuté avec des burkinabés, un peu, de l'afrique et de tout ça et de cinéma avec bruno et sam, puis on est retournés dans ce bar avec la terrasse intérieure, on a fait du charme à la serveuse qui nous a encore offert des verres, bushmills, et j'ai essayé de faire ami ami avec un hipster qui était un putain d'ébéniste et aussi un enculé qui m'a poussé pour x raison, et donc je me suis vautré mais ça n'avait pas grand importance.

chaque matin, le soleil se fait de plus en plus attendre.

amis du soir, bonsoir.

ce post-là va être vite expédié, parce qu'il parle de cours, de la chaleur qu'il fait quand on sort de cours, de l'abrutissante répétition de syllabes entonnées en choeur et d'à quel point je me lève tôt pour me retrouver à la fac (another continent, same shit). parce que, oui, je me lève terriblement tôt, six heures du matin, et même pas pour faire la course avec le soleil, moi hors de mon lit, lui hors de sa pollution. le plus dur, c'est le réveil, parce qu'il fait juste assez bon sous mes draps, et beaucoup trop froid sous l'air conditionné que j'oublie systématiquement d'éteindre, et que je sais pertinemment que la douche va encore mettre cinq minutes à devenir tiédasse, que je n'ai pas grand-chose pour mon petit-déjeuner à part une fin de minute maid orange, et que ce n'est pas encore aujourd'hui que je vais oser goûter l'omelette étrange qu'ils vendent en bas de chez moi. mais bon, life is life, la vieille branche se lève, espère que la douche est libre, elle l'a toujours été jusqu'à maintenant, mes ricains à moi sont plus flemmards que ton cousin qui est en BTS pour vendre de la drogue, et ils n'ont pas vraiment grand-chose à faire de leur vie à part donner des cours à des chinois qui se prénomment superman et michaelbay (sic). la douche est froide, c'est fini en une dizaine de minutes (soit environ trois fois moins qu'en france, je gagne un temps fou pour faire mes lacets). par chance, j'ai encore quelques rice krispies qui implorent ma pitié, ils ont de la chance, c'est le deuxième jour de suite où j'oublie d'acheter du lait. je m'habille vaguement, c'est pas comme si c'était la fashion week dans le bâtiment ices (international cultural exchange student, sisi c'est mon blaze) #2 du campus de handan, hein. après, j'attends toujours un peu dans ma chambre, pour être sûr que mon coloc allemand s'en est allé avant moi, parce qu'il est sympa le jour, mais que son rire nasillard et sa manie à vouloir tout le temps parler est très vite insupportable dès potron-minet.
donc voilà, l'ascenseur du huitième étage me permet de ranger mes clés dans mon sac et de lancer the suburbs sur mon lecteur cd, parce que la qualité est quand même mieux, et que j'en ai pour une heure, donc autant avoir un son décent. dehors, c'est -pour l'instant- toujours chaud lourd humide, et j'ai pas envie d'être en retard comme la moitié de la classe, donc je marche un peu vite, et je ne fais pas vraiment attention à qui que ce soit, excepté au maître de tai-chi qui, tous les matins, fait danser sa veste blanche sur les bords de la rivière suzhou (je déconne pas, c'est merveilleux de le voir). voilà, j'arrive dans le parc du centenaire qui me sert de raccourci, et dès six heures quarante-cinq, c'est blindé, avec des mamans qui font leur forme spéciale de tai-chi, les officiers de police qui siestent dans leur casemate, les vieux en marcel qui me regardent passer, moi et mes cheveux bouclés, et d'autres qui tapent dans leurs mains, debout sur des roches, surplombant les poissons qui se battent pour les bouts de pain d'un petit garçon. un peu plus loin, une fois que j'ai passé l'étang (à ce niveau-là, c'est ready to start qui commence), il y a trois bancs à l'ombre de jeunes marroniers et deux grands portiques en bois où sont fichés, plus ou moins précisément, divers crochets. quand j'y suis passé pour la première fois, la nuit sous la pluie du typhon, je pensais que je me trouvais sur le lieu d'un mémorial au victimes de l'infâme régime de chang kai shek, mais non, à chaque lever du soleil, une cohorte de vieux, avec des souvenirs pleins leurs rides et de la patience plein les poches, viennent se retrouver pour débuter leur journée en amenant leurs oiseaux. doucement, ils les suspendent à la poutre de bois, et se rasseyent pour discuter de ce qui ne s'est pas passé cette nuit, ou pour écouter les oiseaux se raconter ce qui s'est passé cette nuit.
et puis je prends le métro, en passant devant cette échoppe qui vend les pancakes/omelettes du matin, pour deux stations. je sais exactement quelle porte, quel escalier et quel sortie prendre pour optimiser mon trajet. je débarque sur la place nord de la gare ferroviaire de shanghai, cent mètres à faire jusqu'au terminus du bus 942, où il n'y a encore ni contrôleur ni chauffeur au moment où je monte dans le bus. je m'assieds à la meilleure place, celle qui est juste derrière le siège du conducteur, où on peut étendre ses jambes et regarder par la fenêtre, douze arrêts jusqu'à la fac. avant de démarrer, il faut donner sa carte à la meuf dont le titre est "people's security agent" mais qui n'est qu'une meuf avec un brassard, et elle me connaît parce que je suis le seul caucasien sur la ligne à cette putain d'heure donc je n'ai même plus besoin de lui dire que je ne paie que deux kuais parce que je vais jusqu'à fudan. le trajet est un peu long, mais je ne dors pas, je lis parfois, j'écoute arcade fire tout le temps, et je regarde ce qu'il se passe dehors, il se passe toujours des trucs super, des visages improbables, des femmes qui font du troc, des mecs qui lavent leur chien dans la vitrine d'un magasin, des télés qui projettent le logo EXPO2010 non-stop, et des courses entre les taxis verts bleus rouges jaunes.
je sais pas si c'est moi, mais quand j'arrive à fudan, tout le monde dans le bus me regarde bizarrement, le temps que la porte s'ouvre, comme si un étranger n'avait pas forcément le droit d'être dans une université aussi prestigieuse. c'est probablement moi. alors je descends, me fraye un chemin parmi une armée d'étudiants sur une armée de vélos, et il me reste quelques minutes pour rallier mon bâtiment et finir mon cd, au beau milieu d'un campus tout en arbres, en bâtiments de briques et en vélos garés par flots entiers sur les trottoirs. le hall est un peu gris, un peu sombre et par conséquent assez laid, mais le dernier est aussi accueillant que peut l'être une salle avec des fauteuils en bois, des lustres dorés (sortis de je-ne-sais-où) et un nuage constant de fumée d'everlasting pauses clopes. ma classe à moi est au fond du couloir, ma place à moi est au fond de la classe.

la suite un autre jour je suis fatigué j'ai faim.

Tuesday

let's go downtown and talk to the modern kids.

au début, je voulais faire un post sur ma première semaine à la fac, parce qu'il y a quand même un ou deux trucs à dire, mais je me suis vite rappelé que je ne suis pas la pour étudier, mais pour découvrir. alors je vous parlerai de mon prof gay et du mexicain qui ressemble à un juif que j'ai connu un autre jour, d'accord ?

quand j'ai su que je partais, il y avait une partie de moi qui voulait avant tout découvrir le côté "undergroundmusiclivescenecheapdrinks" que mon imaginaire me soufflait discrètement, avec des guitares cassées et des amplis défoncés, un son dégueulasse pour des bières dégueulasses, et des types avec des dreads, des tatouages, et des mâchoires entraînées à avaler des micros tout entiers.
donc, oui, une fois que j'ai eu une connexion internet stable (bien que peu efficace), je me suis mis à chercher par-ci, par-là, les quelques infos qui pourraient exister sur de la musique non-mainstream. je développerai rapidement les tenants et les aboutissants de la musique mainstream shanghaïenne plus tard, soyez sans crainte. finalement, quelques heures de consciencieux épluchage de sites, je finis par choir sur les blogs d'Andy Best et de Jake Newby, plus ou moins la seule source régulière d'informations quant aux whereabouts de la zicmu au pays des lotus bleus. deux trois articles de lus pour comprendre qu'il faut surtout que j'aille au yuyintang (translated to: where music happens), à trois stations de chez moi, je ne crois pas que ce soit une coïncidence.

toujours est-il que j'y suis allé trois fois en quatre jours, que j'ai vu une dizaine de groupes, mais que je ne vais pas m'atteler au rude exercice de la critique musicale, parce que j'y suis vraiment mauvais et parce qu'il n'y a pas vraiment lieu de critiquer quoi que ce soit.
en vrac, un groupe de hard rock, un groupe comme les white stripes, un groupe comme du mauvais joy division mixé avec du mauvais sonic youth mais qui restait très bon, un groupe progressif à te faire vibrer jusqu'à la pinte, et des mecs qui ressemblaient aux chats persans avec plus de monde et plus de disto.
le public est très très européen, je veux dire, pour une petite salle comme celle-ci, et principalement parce que pas mal de membres de groupes sont eux-mêmes européens, donc so much for the local scene, mais les chinois se débrouillent foutrement bien, quand il font autre chose que parler avec l'accent de pékin. la salle de concert est cool, petite, étouffante malgré la dizaine de ventilateurs qui y sont disséminés, mais ils se débrouillent pour avoir des tags sur les murs, des cendriers qui n'étaient probablement pas censés en devenir quand ils les ont achetés, des serveurs en joggings, une carte qui colle au comptoir, des tables entassées au loin et un baby-foot aux pieds maintes fois recollés. et puis la bière n'est pas chère, et les rencontres y sont faciles, et le son est aussi pourri que la musique est, étrangement, de qualité.

alors, oui, il existe une scène underground à shanghaï, il paraît qu'elle n'est pas aussi super que celle de beijing, ce que je vous confirme début octobre. le public est plus ou moins le même que dans toutes les petites salles du monde, à croire qu'être hipster est un réseau social à part entière, et on passe outre les vieux occidentaux qui sont super cools parce qu'il viennent ici à cause de leur haine de pudong. et oui, j'y repars cette semaine.



ah, ouais, je vous offre aussi sur un plateau d'argent le myspace du groupe phare du week-end, boys climbing ropes.

Sunday

Portrait robot

1:00 AM

J'ai fini de parler du métro, on a compris que c'était sale, plein de rats, et que les gens y cherchaient encore plus que d'habitude un moyen d'interagir avec d'autres individus de leur espèce, et qu'on pouvait y écouter des reprises originales des grands '' classiques '' musicaux.
Je ne vais pas qu'à des soirées de hipsters oscillant sur de la cold wave, de meufs qui font du street style, de mecs qui tournent des documentaires sur la laideur, auxquelles je peux manger de la barbe à papa, non non non. On se passera du couplet 9-11 never forget. Les drapeaux ont fleuri partout samedi, c'est tout.

Par un clin d'oeil du destin, parmi tant d'autres (comme trouver 20$ par terre), je me suis retrouvée invitée à une lecture '' secrète '' de Tao Lin dans une librairie de williamsburg vendredi. On dit de lui qu'il est le '' Kafka de la génération iPhone ''. Je n'irai pas jusque là, je n'aime pas les comparaisons débiles, et ce concept de génération iPhone, soit. Toujours est il que j'avais acheté un de ses bouquins le mois dernier, que j'avais aimé, certainement parce que certains passages me parlent, ceux sur l'ennui par exemple.

On était douze. Tout le monde buvait de la hebrew beer; chacun s'est présenté tour à tour, ça ressemblait vaguement à une réunions d'Alcooliques Anonymes, ou du moins au portrait qui est fait des réunions d'AA. Certains m'ont tendu leur business card. Tout le monde ici a sa petite carte de visite, ses petits papiers noircis au préalable avec son adresse email et son numéro de téléphone; pour être prêt, au cas où on rencontrerait la bonne personne au bon moment. Tao Lin a lu un extrait de son dernier livre, Richard Yates, et fait tout un exposé sur les hamsters. Avant de partir, il m'offre son livre parce qu'il aime les robots et que d'après lui mon prénom ne peut être qu'un prénom de robot, d'autant plus qu'il semblerait que je ressemble à un robot. Il ajoute que j'ai le profil idéal d'une voleuse à l'étalage, que j'ai l'air tellement innocente que je devrais en profiter. J'ai placé la blague '' Tao Lin Soccer '', il m'a trouvé '' drôle pour un robot.''

J'ai '' brunché '' - que je déteste ce mot - ce matin, je suis allée au musée d'histoire naturelle avec Céline, on s'est posées dans un café aux canapés confortables, le mec a même fait des petits coeurs avec la mousse au dessus de cette orgie de chocolat. En rentrant chez moi, j'ai lu sur mon canapé violet, dîné un avocat organic qui traînait dans le frigo, avec un morceau de faux fromage, et c'était dégueulasse, du plastique. J'ai grossièrement photographié les tatouages derrière les oreilles de Julio, il se demande pourquoi juste ceux là, alors qu'il en a le corps entièrement recouvert. Je me moque un peu de son tee-shirt avec des loups, des ours et aigles dessus, qu'il porte évidemment de façon ironique. Il annonce qu'il repart définitivement en Espagne, c'est un peu triste parce qu'on commençait à avoir des discussions intéressantes.

Ma coloc Jackie m'a lu les poèmes qu'elle doit rendre demain, on a eu un mini-débat à propos de Bukowski, parce qu'elle le déteste et moi pas; comme elle est encore plus têtue que moi, elle boudait un peu. Je l'ai fait rire en imitant l'accent latino des filles qui venaient de passer sous notre fenêtre en parlant outrageusement fort, et les Video Music Awards ont achevé l'opération '' suppression de toute tension dans cette maison ''. On commentait le spectacle offert par MTV, le nombril étonnamment haut de Cher - oui, elle est toujours en vie -, ses sourcils étonnamment immobiles, et ses cheveux étonnamment faux. Elle a filé l'award à Lady Gaga qui portait une robe en viande. Puis un petit tour chez Hana's, le deli d'en bas ouvert 24/24, et le mec à la caisse m'a fait son numéro habituel '' Comment ça va, ça va ça va ohlalala c'est la vie vive LE france, do you finally want to go on a date with me ? ''. Non toujours pas, je veux juste un coca.
Je devrais arrêter de boire autant de coca, je vais finir avec un trou dans l'estomac. L'autre jour, j'en ai pas bu de la journée, et cet horrible mal de tête n'était pas lié à la débilité de certaines de mes collègues, mais bien à cette absence de coca dans mon organisme, j'en suis sûre.
Il est temps d'aller me coucher.

Saturday

environ 3h, je crois.

hahah je suis un peu saoul. je suis effectivement allé au match de soccer avec sam, puis on y a vu pierre alix. les filles ont gagné 3-0 contre l'uquam, deuxième fac française, de seconde zone, à montréal, elles étaient pas mauvaises, pour des meufs, mais leurs adversaires étaient vraiment bidon. ensuite pierre alix avait froid, parce qu'il faisait 20° mais plutôt froid en fait, et donc on est passés chez moi prendre des clopes et boire un whisky puis partis chez pierre alix. sur le chemin on a acheté des bières et moi à manger et on est allés dans sa coloc picoler un peu quand ses colocs ont débarqué et j'avais vraiment l'air d'un mec de droite. j'étais rasé avec une chemise bleue ciel à col boutonné et un gilet en cachemire ralph lauren et un pantalon de costume et des stan smith que personne n'a du remarquer et c'était plutôt drôle puis on a cherché un bar avec bruno sam pierre alix et océane, on l'a trouvé puis on se l'est doucement mise en parlant de l'existence de dieu et de l'univers infini comparées puis je suis rentré en claquant 20 balles de tacos, mais ça valait le coup et c'était bien même si j'ai parlé à aucune meuf bonne.

Friday

allez ta gueule

12.42pm

so, bébé. comment tu vas?

cette semaine, je suis allé en cours. c'est cool, j'ai du claquer masse biff en bouquin, en lire, regardé un bout d'Oliver Twist, maté les Sopranos, regardé la NFL et les matchs de l'Equipe de France de foot, parlé à mes voisines en cours, pour prendre un stylo, filer des notes, ce genre de petits trucs de merde, pas rencontré grand monde. je suis allé courir et je suis allé nager, pas longtemps à chaque fois mais trop vite trop fort comme je le fais toujours parce que je suis bon pour me surestimer. ce soir je vais voir un match de soccer. je vais probablement passer mon temps à gueuler parce qu'on joue comme des merdes.

à propos de l'accent, il est absolument pas drôle. quand il est trop prononcé, il est simplement insupportable parce qu'il est traînaaaaaaaant et qu'on perd un temps fou avec tous ces phonèmes qu'on étire. à propos de l'accent il est encore totalement désarçonnant, surtout quand tu adresses la parole à une meuf, bonne ou pas, et que tu t'aperçois en fait que sa façon de parler ne colle absolument pas à l'image de la féminité toute douce et virginale que l'on peut avoir. je n'induis pas en utilisant l'adjectif virginale que toutes les femmes dépucelées sont des putes.


les blogs d'expats, c'est une plaie. je veux dire, je comprends qu'on ait des centres d'intérêt différent des miens, des visions des choses différentes des miennes, qu'on se mette comme règle d'écrire UNE fois par semaine, de façon sûre et certaine ou même qu'on titre ses articles "du huit.huit au quinze.huit", fine, whatev, mais sans déconner, tu t'es vu quand t'as écrit que tu devais te "plonger dans les méandres de l'écriture"?! mec, déjà se prendre pour baudelaire est bidon mais alors en plus choisis-toi un modèle qui tient la route. sans déconner, tu te plonges dans rien tu te vautres dans la fange factuelle de ta semaine à nous parler de ce qu'il s'est passé lundi ce qu'il s'est passé mardi ce qu'il s'est passé mercredi ce qu'il s'est passé jeudi ce qu'il s'est passé vendredi ce qu'il s'est passé samedi et ce qu'il s'est passé dimanche et plein de photos au cas où on ne sache pas imaginer, ou parce que tu ne sais pas décrire. et puis si tu veux, cette obsession pour "LA POLITIQUE", la réduction des gens à leur adhésion politique, cette idée que le sel de toute discussion est LA POLITIQUE et ce qu'on pense du régime de machin et de la révolution au Nicaragua et la gauche et Marx et les idéaux et machin et truc muche, parce que je suis à sciences POLITIQUES juste pour la POLITIQUE, ça me donne envie de vous pisser au cul. voilà c'est dit.

Monday

Faux et usage de faux

4:59 PM - écrit samedi matin, 4 AM - New York

J'ai officiellement une fake ID. Une vraie Fake Id, une carte d'étudiante d'école de commerce, avec ma photo, plastifiée, tout ça tout ça. Jusque là, j'avais la photocopie de l'ID d'une amie née en 88, et les mecs devant les bars et autres clubs de live music me lançaient des regards genre '' non mais c'est un bout de papier, à d'autres ma petite '.
Je me mettais alors à sortir un laïus prémaché, en surjouant un peu l'accent français, non mais c'est parce que si je perds ma véritable carte d'identité et bien je pourrai pas rentrer en France, c'est pour ça que j'ai qu'une photocopie, allez, sois sympa je suis une pauvre jeune fille de 19 ans qui veut juste rentrer dans ce fichu bar et écouter un peu de musique, en plus je ne bois pas, c'est vraiment n'importe quoi ce pays, mais allez, s'il te plaît, si tu veux on discutera un peu quand je sortirai prendre l'air. Tu me laisses passer, oh thank you so much, have a great night too, amuse toi bien à recaler les gens.

Etre underage aux Etats-Unis est un frein social. J'ai dû renoncer à pas mal de soirées et de concerts à cause de ça, des deux ans qui me manquaient pour exister aux yeux de la loi américaine, mais là, grace à ce bout de plastique, je vais pouvoir mettre les pieds dans ce bar en bas de chez moi qui me fait tant envie, entre autres. Voila, je suis désormais étudiante dans une obscure école de commerce française, et je suis née le 19 décembre 1988. Hum.
Tout est un peu contradictoire dans ce pays; c'est un peu comme l'histoire de l'alcool sur la voie publique. C'est interdit, mais on s'en fout si c'est caché dans un sac en papier. Sauf que bon, puisque t'as un sac en papier, on sait pertinemment que tu bois de l'alcool. On emballe pas sa bouteille quand on boit du Sprite sur la voie publique. Logique.

J'ai enfin acquis ma fake ID, lors d'une soirée vendredi chez un mec de sciences po. Ça ressemblait vaguement à la soirée avec Vadim et Pierre quand ils étaient là, mais sans Vadim et Pierre, et avec moins de monde.
A leur place, deux américains qui se jettent un peu sur moi parce qu'ils savent qu'on se fait la bise, ils veulent apparemment leur part de french culture. Puis d'autres filles, qui se trémoussent sur du Rihanna. Enfin elles '' grindent '' donc elles se trémoussent sur du Rihanna comme Rihanna, habillées comme Rihanna. Quand elle met son cul en arrière et qu'elle bouge ses hanches. Qu'elle porte une sorte de legging géant avec un imprimé très Keith Haring en guise de pantalon. Donc ça ressemble plus à de l'éveil musculaire qu'à de la danse.

Je m'accroche à ma bouteille de Diet coke parce que je ne suis pas très à l'aise, et un mec me charrie doucement, genre ''haha, tu bois du coca ? T'as des examens médicaux demain ?''; je lui lance un regard mauvais parce qu'il commence à me souler, d'autant plus qu'il se met à détailler toute sa généalogie, 70% irlandais, 20% native, 10% afro,et regarde dubitativement mes mocassins genre sale meuf qui exploite mon peuple de la réserve de minnetonka. On les abandonne quand ils sautent dans un taxi, les filles veulent continuer à se dandiner (si on peut appeler ça se dandiner), mais avec un plus large public, donc direction le métro pour moi.

J'oscille entre l'amour et la haine du métro ici, il y fait 20°C de plus qu'à la surface, des rats partout, et c'est toujours l'occasion d'un choc thermique parce que les wagons sont sur-climatisés. Mais j'aime bien la voix de la fille qui annonce l'arrivée du métro, et celle du mec qui dit de faire attention parce que les portes se ferment. Il s'y passe toujours quelque chose. Cette fois, station 42nd, A.C.E train, des renois prennent des photos d'elles. Elles ont certainement passé la soirée dans ce club sur Times Square, où on peut bruncher le midi, voir Al Green jouer à 19 heures, se croire dans un clip de Dirty South à partir de 22h.
Elles développent les poses, aguicheuses. La croupe en évidence, vas-y que je me cambre au max, que je rentre, sans succès, le ventre, bombe le torse, que je plisse les yeux et prépare ma duck face. Oh, tiens, si je levais la jambe sur la rambarde, ça mettra en avant mon postérieur qui dépasse légèrement de mon slim deux tailles trop petit.

J'ai dû les regarder avec trop d'insistance, car le mec avec elles me demande de garder un oeil sur leurs sacs. Clic clac, clic clac, elles enchainent les poses lascivo-vulgaires en pouffant et lachant des petits cris. Ces filles seront certainement des mamas d'Harlem dans quelques années, tout en ayant les tics des pouffiasses américaines type Abercrombie. Celles qui disent OHMAAGAD toute la journée, qui lâchent des yays et autres petits cris aigus à longueur de journée.

Ils m'ont demandé de les prendre en photos tous ensemble, le mec a pris une pose de PIMP avec sa New Era argentée, les filles se sont collées à lui, il m'a proposé un cookie pour me remercier, mais j'avais pas très faim parce que j'ai mangé une slice dans la meilleure pizza place de la ville, à deux minutes de chez moi. Ils font meme des pizzas aux macaronis, pas dégueulasses du tout.
Une fois dans le métro ils ont continué à prendre des photos, comprenez le potentiel offert par une barre et une rame presque vide. En voilà une qui se lance dans un numéro de pole dance assez ridicule. Je change sur 8 ave, ils me disent Goodbye be safe lalala, je saute dans le L train, et là, la population change, un couple avec des fixies, un mec avec une barbe étonnamment longue et des lunettes de Derrick. Un mec décide de me dédier une chanson, il entonne Eleanor Rigby.
C'est gentil, même si je ne me sens pas bien, parce qu'il me transperce du regard en chantant all the lonely people. Il en fait une autre, Norvegian Wood, il aime bien les Beatles apparemment. Je vois qu'il a quelques billets dans sa guitare, je pense à lui filer un petit $ parce que c'était bien, quand même, mais je n'ai pas de billets sur moi, je me sens un peu con du coup, et il s'en va en souriant, pendant que je descends à Lorimer St, rejoindre mon appart au dessus du Italiano Center of New York.

Mon coloc est rentré du Japon, et de nouveaux hipsters dorment sur le canapé. Celui qui câline son Iphone est de retour. J'ai un peu marché sur tout le monde en rentrant, mais ils avaient l'air contents de me voir. Ma coloc les a virés le lendemain matin, les pauvres.

souvent, je pense aux thunes que je ferais en étant artiste contemporain.

le 6, à 23h30

chai yiming, twenty, aquarelle sur toile


bon, cette fois, un post plein de sérieux et dirigé sur un sujet précis, et non plus une série divagations/effets de style douteux pour essayer péniblement de dépeindre la ville. ce soir, pour moi, c'est mogashan lu (ah, oui, lu veut dire rue, prononcer lou). située au milieu de nulle part, au détour d'une rivière et derrière des HLM, c'est la rue des galeries d'art contemporain, entassées dans des cubes gris au numéro 50. en france, mon parrain, grand spécialiste du milieu, m'avait dit que certains artistes chinois s'arrachaient dans l'hotel d'artcurial, donc j'ai quand même décidé d'y aller, pour faire un truc de ma vie, et ne pas finir comme mon bien-aimé coloc allemand qui regarde burn notice le jour et se fait masser la nuit.

donc voilà. avant même de débarquer dans le lotissement, j'ai un bon a priori, parce que je viens de découvrir le seul quartier de shanghai où il y a des tags, et des jolis, très jolis tags, et j'ai toujours rêvé d'en faire, des jolis tags.
une fois dans le truc, c'est avant tout un vivarium terrible pour voir les riches chinois qui demandent des prix à tout bout de champ, et pour les jeunes chinois qui se croient branchés. pas tant d'expatriés que ça, though, c'est assez cool.

quand au contenu en lui même, c'est vachement inégal, mais j'ai la flemme de me prendre pour un critique, et je sais mal critiquer, donc je vais me limiter à l'énumération de ce que j'ai noté en étant là bas (dont le nom des artistes, hein).

en gros (parce que j'ai eu un problème avec internet et le ministère de la tolérance de la république populaire de chine et j'ai paumé le reste du post), ça se résume en un chinois qui dormait du sommeil du juste devant la galerie la plus chère, une pièce au mur blancs avec des toiles entreposées tant bien que mal à même le sol, une toute petite chinoise avec un tshirt BREATHLESS qui était fan de godard, des photos très propres, très descriptives mais sans aucune émotion, des reprises/perversions de la peinture et calligraphie classiques chinoises, et des portraits de femmes nues, beaucoup trop. puis, une note dans mon carnet qui disait que pour faire une oeuvre d'art contemporain chinois il faut un mix de sexualité, d'occident, d'étoiles rouges, d'armes à feu et d'argent.

donc ça peut-être très bien, ou très joli, ou très décevant.




maintenant j'ai le droit de vous dire que j'exècre l'art contemporain de quelque continent que ce soit et donc que je sais ne pas être biaisé (ça vaut pour vadim et ibtissame, cette remarque, surtout).

Sunday

james joyce versus the world

le 5, à 22h25

ok, on attaque les choses sérieuses, les vrais articles intéressants sur ce qu'est la vie, la vraie, à shanghai. ça fait depuis le premier jour que j'ai ce post en tête, parce que, même quand j'ai débarqué à l'aurore, au beau milieu de la ville (renmin guang chang a.k.a. la place du peuple, c'est un peu comme times sq, mais en plus grand, avec un parc au milieu), il y avait des gens dans la rue. je veux dire, ils étaient vraiment dans la rue, c'était leur destination finale, ils n'avaient pas de but particulier, sauf celle d'un bout de muret libre où ils pourraient s'asseoir, et attendre. c'est dingue parce que, si moi je fais ça, c'est pour m'imprégner de la ville et humer ses saveurs et toutes ces foutaises, mais eux n'ont rien à découvrir, ils ne font rien, ils attendent, ils ne fument même pas de clope, il fait trop chaud, c'est magnifique à voir.

pour te re-situer un peu par rapport au titre, je me suis dit en partant de france qu'il fallait que j'emporte un bouquin qui allait me tenir longtemps, parce que j'aime de moins en moins lire en anglais et qu'il y a NO WAY pour que je bouffe de la propagande chinoise (quoique, lu xun dans le texte, ça en boucherait un coin à pas mal de chauffeurs de taxi), donc j'ai pris ulysse, parce que le relire me permettrait vraiment de bien tout saisir, et parce que ce bouquin est vraiment fabuleux. la principale chose que j'ai saisie la première fois que je suis tombé dedans c'est que, pour joyce, la vie se passe dans la rue, les protagonistes s'y rencontrent, y discutent, s'y promènent et la dominent complètement, sa rue dans son dublin à lui, c'est un espace qui appartient à tout le monde, qui n'est pas sale, qui n'est pas dangereux, et qui n'attend que d'être habité. alors, même si ce dublin a disparu, remplacé par une station de vacances pour les touristes étudiants de l'europe continentale, il y a toujours la chine, avec ses habitants qui ne s'embarrassent pas de prétextes nuls pour glander en regardant passer des hommes pressés et des flics crevés et des balayeurs qui balaient leurs pensées. on ne va pas rester chez soi si on peut lire un bouquin sur les marches d'une galerie commerciale, on ne va pas épeler les pommes de terre dans son arrière boutique quand on peut le faire en discutant avec la mignonne qui tient le salon de massage, et chacun sait qu'il est ridicule de jouer au mah-jong dans son salon avec ses amis quand on peut s'installer sous une autoroute.
voilà, ils sont là, dans la rue, passent leur vie à voir les autres, à interagir avec ce qui les entoure, à attendre de se lasser, ou de se remettre à travailler, ou de se rendormir. et puis ils regardent passer les occidentaux, parce que c'est rare, et que les occidentaux ne sont pas dans la rue, pas dans les bus, pas dans les métros. ils sont dans leurs duplex, dans des taxis et dans des boîtes avec de la musique forte. je développerai sur les expatriés, la nouvelle lie de l'humanité, plus tard, pour faire honneur à la merde qu'ils cachent sous leurs chemises déboutonnées, mais je tiens vraiment à te faire comprendre ça, tu vois. on a beau saisir parfaitement la perte du truc (appelle ça l'authenticité, la vibe, l'atmosphère, ce que tu veux, t'es une grande personne, hein) qui faisait que vivre en occident, c'était cool, et qu'on pouvait checker ses potes dans la rue sans à avoir à les checker sur foursquare cinq minutes avant, il a fallu qu'on aille aux quatre coins du monde, et qu'on montre à tout ce qui n'est pas caucasien à quel point on était forts pour ce qui est de ne pas apprécier ici et maintenant. dédicace pour l'étudiant de l'em lyon qui, hier, dans un club au 24° étage d'un bâtiment de pudong, alors qu'un serveur tout petit et tout chauve, comme le bonze le plus sage du monde, lui resservait un whisky coca, cet étudiant qui me disait que, faut pas déconner, paris est quand même bien plus belle que shanghai. ouais, mais shanghai, eux l'habitent, et toi tu te pavanes de ton appartement à ton taf à ton appartement à ton restau à ton bar à l'appartement de ta copine asiat, à la boîte en bas de chez elle à ton appartement.

les habitants de shanghai n'en ont pas tellement besoin, la nuit ils dorment parce qu'ils font des trucs biens le jour. cette idée qu'on a encore du we own the night, c'est un peu notre seul repaire, notre dernier bastion, une fois qu'ils se mettront à se promener dans les rues à deux heures du matin, avec leurs vieux marcels sales et leurs pensées que je ne connaîtrai jamais, on aura perdu la partie.

Saturday

vertes contrées

6.20 pm.

aujourd'hui il a plu. il a plu, il a fait gris, avec un vent à décorner les cocus. ça m'a fait un bien fou parce que, pendant que j'imaginais débarquer à 20° je suis tombé sur une chaleur à vous convertir à l'ice coffee. j'ai pas cédé, parce que j'ai des principes, et parce que j'ai trouvé de la vitamin water à un prix ahurissant autour du campus où l'on n'en vend pas en vertu d'un accord préférentiel avec pepsi, qui, donc, a besoin d'être placé en situation de monopole pour s'en sortir. ah et si vous voyez pas encore le lien entre les deux, c'est que vitamin water appartient à coca cola.

depuis une semaine, presque, que je suis là, je culpabilisais un peu de pas trop avoir quitté le campus, à part pour aller à Walmart, la banque, ouvrir une ligne téléphonique etc. à ces occasions diverses j'étais tombé, en entrant dans une église orthodoxe arménienne, sur une cérémonie funéraire, avec le mort et le cercueil ouvert et 4 hommes en costume et 5 femmes à tout casser et je serais bien rentré prier ou je ne sais pas trop quoi mais j'étais en short et ça allait pas.

aujourd'hui il y avait un chat mort dans l'herbe et je l'ai pris en photo et j'ai pensé au créateur d'omegle qui aimait bien faire ça. je suis allé manger un burger chez patati patata, censément un des meilleurs de la ville, et il était pas mal mais trop petit et j'ai fait tomber du jus de viande ou de bacon sur mon short donc j'étais un peu vénère, puis j'ai rendu fou un type qui vendait du matos de cuisine parce que je cherchais un ouvre-boîte de type français, le petit avec simplement un crochet pointu qu'on enfonce et je n'arrivais pas à m'expliquer et il me proposait tous ceux qu'il avait, dont le même que le mien sauf que le sien valait le double, parce qu'il avait été fabriqué en angleterre, ce qui est un gage de qualité, et quand il a compris que j'en voulais un petit il a fouillé frénétiquement pour me montrer tout ce qu'il avait de petit avec son père, derrière le comptoir, sage, qui lui disait: non mais il cherche un modèle qui existe en France, ils ont ça en France, pas nous, et l'autre qui n'écoutait rien, qui fouillait frénétiquement et qui me tendait tout ce qu'il trouvait, et puis j'ai vu chinatown, qui est comme tous les chinatown du monde, avec de la bouffe et plein des magasins de merdouille et de trucs pas trop chers et de chinois, avec des grandes arches chinoises aux entrées du quartier qui signifient que l'on est pas chez n'importe qui ici. après j'ai vu le vieux port qui avait des bassins sympas avec des pédalos ou des petits bateaux téléguidés, des ponts et des passerelles et un batiment en fer et pleins de vitres avec une coupole en verre, mais au début j'étais un peu déçu parce que c'était surtout une putain de marina de merde avec des parkings et des petits bateaux à moteurs de 6 à 15m et un yacht qui foutait je ne sais quoi ici mais après j'ai vu deux vieux cargos rouillés et des écluses alors j'étais content, il y avait aussi des bus amphibies qui roulent et flottent, et un autre bassin avec des nénuphars et il faisait sombre à cause des nuages et il y avait du vent et c'était bien. ensuite j'ai vu le vieux montréal qui ressemble au vieux lyon en plus neuf et le quartier financier et puis aujourd'hui c'était tout.

hier je suis sorti, j'ai vu des amis de sciences po on a bu des bières et j'étais saoul très vite et pour rien à cause de la bière et de mon estomac vide et on est sortis boire des bières, dans un parc où on a donné de l'argent à un clochard qui nous a averti que c'était une mauvaise idée de picoler dehors, puis dans un bar et on a parlé des gros seins qu'aurait la population féminine de montréal et j'ai dit que je préfèrais les petits seins pour qu'elles aient pas de gros cul et de ce genre de choses de mecs et c'était agréable, ne serait-ce que parce que je parlais avec des gens que je connaissais, jusqu'à ce que je sois vraiment trop saoul, trop défoncé, que je sente chaque goutte d'alcool dans mon corps me faire mal, que je m'assoupisse, que je sois conscient du fait que chaque gorgée m'éloignait de son but original mais que je la buvais quand même. j'avais pas vraiment bu depuis super longtemps; j'ai réduit ma consommation à des prises régulières mais minimes d'alcool fort, presque médicamenteuses. donc j'étais vraiment saoul, la serveuse avait de gros einss et les cheveux courts et un pote l'a chinée vénère et elle était sympa même si elle a réclamé son pourboire que j'ai pas encore l'habitude de donner, que je n'ai pas donné aux taxis ni au dinner l'autre jour en pensant qu'ils allaient se servir sur mon billet et qu'ils n'ont pas eu l'air gêné de pas l'avoir. sur le coup de 3h, ils m'ont posé dans un tacos et je suis rentré. avant de me coucher, j'ai réalisé que j'avais pas souvent pris le taxi seul avant de venir ici, et encore moins pour des trucs simples comme rentrer des courses ou de soirée, que ça devait être des restes de mon éducation, genre éviter les dépenses superflues.

les québecquois sont assez fascinants, dans le sens où ils sont tous bilingues, mais ils ont un côté plus royaliste que le roi dans la défense de la langue française, ils y attachent plus d'importance que nous, ils traduisent tout, et ils prétendent donner des cours de français et je trouve ça très drôle. c'est assez multiculturel aussi, y'a plein de porthos, d'espagnols et de magasins qui y sont consacrés, mais peu de blacks j'ai trouvé, beaucoup de punks à chien aussi. une grande partie de la ville est résidentielle, c'est pas bien différent de dommartin ou de whisteria lane et y'a pas grand chose niveau commerce, c'est assez cossu, et downtown les immeubles sont assez petits, très européens en somme, pas très cohérents non plus.

montréal est pas une ville très impressionnante. c'est pas shanghai c'est pas new york, ni l.a. ni rien, ni même chicago, ça tient plus de washington, peut-être même de londres, c'est, à ce que j'en ai vu, très agréable à vivre, mais c'est pas une énorme claque que d'y débarquer, on ne s'y balade pas les yeux écarquillés dans un monde complètement nouveau ni rien. de ce point de vue là, c'est très rassurant, mais y'a aussi un côté, "sans déconner, j'ai fait 5000 bornes pour ça?" qui devrait être vite s'estomper quand j'aurais une vraie vie.

Friday

better city, better life

shanghai, 2:00 am

quand je suis arrivé, je pensais que j'écrirais, chaque soir, mes péripéties de la journée passée sur un joli petit carnet rouge, puis que je les recopierais du carnet sur mon ordinateur, et que je les posterais sur internet, somehow (eastcoasts n'existait pas encore, alors).
en fait, j'ai été beaucoup plus paresseux que prévu. le fait que je fasse des trucs concrets de mes journées est déjà un gros gros point positif pour que je m'octroie bien le droit de m'avachir devant le madden nfl de mon coloc du colorado ou de regarder par petits bouts un film mal doublé. néanmoins, ça commençait à me peser sérieusement, le fait de ne garder aucune trace écrite, et de ne pas développer tout ce que j'avais dévoré de curiosité pendant la journée. tu sais, ce genre de remords que tu as quand tu ne veux pas faire un truc qui n'est pas obligatoire, mais qui serait bien quand même, surtout quand tu l'entends avec la voix de ta mère. finalement, je me suis dit que j'allais faire l'adolescent cliché, et que j'irai seul dans ce club de jazz des années trente pour boire du whisky et enfin inaugurer mon moleskine en faisant comme si j'étais inspiré. le truc, c'est que mon côté fais-toi-plein-de-potes-à-shanghai a fait en sorte que mon coloc allemand qui écoute de l'électro à longueur de journée vienne avec moi, donc je me suis retrouvé sans mes pensées, et avec une conversation à gérer, dans ce club.
une fois assis au bar, dans une ambiance très cosy, low lights, velvet chairs and art nouveau, cernés par des expats qui ramenaient leur conquête chinoise pour la soirée, j'ai rencontré un type. gros, barbu, toussotant, il a dit bien aimer mes cheveux, et il m'a appelé 'brother'. dans une ville où on ne prononce pas correctement mon nom, c'est assez jouissif. en fin de compte, il s'est avéré, en plus d'être complètement bourré, être le lead guitar du groupe résident ET le patron du club. ce mec a tout compris. toujours est-il que, d'une manière ou d'une autre, il m'a demandé si j'écrivais mes pensées dans un journal, chaque jour, et qu'il faut vraiment le faire parce que ça peut parfois changer la manière dont on voit les choses. alors, je ne suis pas d'accord sur le fait que ça puisse changer quoi que ce soit, mais je lui ai promis que je ferai ça ce soir. t'as vu, j'suis un type bien.

parlons de la ville, en général. le premier truc qui m'a frappé, c'est qu'aucune chanson ne va avec cette putain de forêt en béton. je veux dire, je peux assimiler the smiths à lille en automne, vampire weekend à bordeaux en juin, biolay à paris en février, mais il n'y a rien qui corresponde à shanghai. un jour, il y pleut à torrents, et le ciel et jaune, et les voitures sont bruyantes, et ça sent la bouffe dans chaque recoin d'avenue, et personne ne te laisse descendre du métro quand t'as des valises, et il fait chaud, et on te dit qu'on ne parle pas anglais, et on te poursuit pour te vendre un ipad, et on ne fait même pas attention à toi quand tu prends des photos, et la pollution rend tout plus chiant plus chaud et la gorge te pique quand tu fumes une clope. le lendemain, il fait bon, il y a du vent, des jolies chinoises qui te toisent dans la rue, le contrôleur du bus prend de tes nouvelles, et les nuages vont vite dans le ciel bleu, et les criquets te bercent dans le century park, et les poubelles ne sentent pas, et les taxis ne t'enculent pas, et tes jambes te portent jusqu'à pudong, et les portes des magasins t'offrent tout l'air conditionné qu'ils ont, jusque dans la rue, et on ne te prend pas pour un imbécile quand tu commandes tes nouilles. et puis il y a la nuit, qui n'est jamais tout à fait la même, ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend, avec le repos de tous, les rires gras dans des restaurants suintant le baijiu, et les cigarettes fumées par les portiers à l'intérieur de résidences vides, et les chinois qui font comme si les européens n'étaient pas les rois du monde, et ces filles bien mal habillées qui cherchent quelqu'un parce que sinon c'est mal vu par la famille, et ces types en tongs qui rient parce qu'ils ne font pas attention à tout ça, et la petite vendeuse qui s'endort dans sa supérette, et les retours à la maison, près de la rivière, sous le pont alexandre III.
c'est la ville où tu ne trouves jamais vraiment ce que tu veux, les musées sont fermés, mal indiqués, trop loins, pas intéressants, mais en contrepartie, on t'offre le coin de la rue avec les scènes de la vie quotidienne qui ont fait rêvé les écrivains de tout poil et qui sont mortes de lassitude en europe, on t'offre une vue bien plus jolie, avec des nénuphars, des oiseaux et du tai chi, on t'offre les marchés couverts qui puent la merde et qui vendent de la porcelaine à la taille des moineaux, on t'offre tout ce que tes yeux peuvent engloutir, du moment que tu gardes le sourire.

un guide touristique ne sert pas à grand chose, en fait, dans la ville de fais-ce-qu'il-te-plaît.

Thursday

Le diable s'habille en Quetchua

New York, 03h57 AM

Cela va bientôt faire deux mois que je suis ici.
Un mois et vingt-sept jours plus exactement, que je vis dans la Grosse Pomme. Je reviens du cinéma, je voulais voir un film de gosses, parce que je suis une gosse au fond, mais il était en 3D, et je déteste la 3D, donc j'ai vu une comédie romantique alors que je déteste les comédies romantiques.

C'est un peu un truc de personne bien installée dans une ville, que d'aller au cinéma après le travail, mais à ma décharge, je vais toujours au cinéma sur Times Square. Pour me rappeler que je suis à New York, et pour ne pas tomber dans le métro-boulot-dodo. Les lumières, les écrans, les odeurs, la bouffe, les asian qui proposent des caricatures, la chaleur, les étudiants qui brandissent leurs cartons de comedy club, les magasins qui t'offrent un peu d'air climatisé, les portes grandes ouvertes, les bras tendus, les cops, les touristes, le M géant de McDonald's, les taxis jaunes, les vélo taxis, et les lumières, à droite, à gauche, en haut, en bas.
Ca grouille de partout, je proteste un peu contre la marée humaine en marchant sur la route, à mes risques et périls évidemment.
J'aime cet endroit, même si j'en reviens toujours lessivée, le cerveau retourné, mais au milieu de tout ça, je me sens vivante, et je me sens presque appartenir à quelque chose.
On croit tout avoir lu, vu et entendu sur cette ville quand on arrive ici. Gossip Girl, King Kong, Annie Hall, Breakfast at Tiffany's, American Psycho, Franck Sinatra, The Velvet Underground, Jay-Z, tout ça tout ça. Pourtant, la ville se présente sous de nouveaux aspects tous les jours, et à chaque instant je découvre une nouvelle facette de la ville.

Ca fait deux mois que je suis là. En lisant Vadim et Pierre, fraîchement arrivés, je me dis que je suis complètement partie à l'arrache. J'ai un peu fui au milieu de la nuit en taxi avec ma valise et mon sac quetchua. Mes parents n'étaient pas là, encore moins mes frères, donc pas d'anecdote de frère (j'ai pas de soeur) qui chouine en me voyant partir à l'aéroport avec la grosse dame de la Lufthansa qui ne comprend pas pourquoi je n'ai pas besoin de formulaire ESTA (J'ai un visa idiote). Non, personne à l'aéroport, juste ma meilleure amie, à 5 heures du matin, qui me dit à dans un an hein, amuse toi bien, j'essaierai de venir c'est sur, tu vas me manquer voila, devant la borne des taxis. Le mec dans le taxi, quand il eut fini de gueuler contre sa radio, m'a demandé si je faisais une fugue, j'ai dû donc lui faire la causette, non je pars un an à l'étranger, oui aux Etats-Unis, à New-York. Vous n'avez pas peur ? Non pas tellement.

Je n'ai pas eu le temps d'avoir peur, de me triturer l'esprit, de me dire oh mince où est-ce que je vais vivre, Mastercard ou Visa, quel temps fait-il, oh machin va me manquer dis donc, et si je me fais pas de copains, etc. Je me suis retrouvée parachutée ici comme dans un rêve. OK, la petite excitation du départ était là, quand j'ai fait ma valise à deux heures du matin, quatre heures avant mon vol, mais l'idée de l'année à l'étranger demeurait jusqu'aujourd'hui une idée assez intangible.

En sortant du cinéma, malgré la chaleur étouffante, j'ai parcouru la 5ème avenue, de la 42ème rue à la 14ème, je suis passée devant l'Empire State Building - qui est moche, un peu - et le Flatiron - qui est lui, l'un de mes bâtiments favoris ici - j'ai commencé à me rendre compte que je n'étais pas en vacances, mais bien en plein dans mon année à l'étranger, celle dont nous avons tant parlé ces deux dernières années.
J'ai rejoint Le métro sur 1st avenue pour rentrer à Hipsterland, Brooklyn. J'ai dû affronter le petit passage vide pour aller à l'autre bout de la plateforme. Je sais qu'il y a des rats à cet endroit, ils sortent par dessous la petite porte, à la moindre activité humaine, alors j'ai toujours peur de passer devant cette porte. Quand je rassemble enfin mon courage et me décide à passer en courant presque, un mec décide de réveiller les rats en sautant comme un demeuré (les méfaits des drogues et de l'alcool). Un rat sort, dévale sa portion de plateforme, finit sur les rails, et disparaît.
Hum.
Je suis pétrifiée comme d'habitude (mais j'ai retenu tout geste ou cri étrange), le métro arrive, je saute dedans, sans penser à ce qu'il a pu arriver au rat. Bien fait pour toi sale rat.
Dans la rame, je m'assois à côté d'une fille un peu amochée qui me montre son '' nouvel ami rose qui vibre '' au bout de trois minutes de voyage. Intéressant. A ma gauche, un mec lit Virginia Woolf, The Years, et celui en face de moi lit Mexico news qui titre '' decapitan a mujer policia ''. Tout un programme.
Un mec joue Lady Gaga avec sa flute à bec, c'est la deuxième fois que je le croise, je sais déjà qu'après Alejandro, il va nous faire Hotel room de Pitbull, enchainera sur Hit the Road Jack de Ray Charles, et conclura sur la chanson des Yankees. Tout le monde applaudira comme la dernière fois, et ça me mettra de bonne humeur comme la dernière fois.
Tout le monde a applaudi.

Je viens de tuer ce moustique qui me cherche depuis 45 minutes. Ma coloc ne serait pas fière de moi.


Wednesday

pendant ce temps, de l'autre côté de l'oural...

shanghai, 21:27

bon, voilà, je vais vous faire un résumé rapide de ce qui m'est arrivé, parce que je suis là depuis quatre jours et que ça me paraît être une éternité, et que j'ai l'impression d'avoir toujours habité ici. et puis, je vous épargne mes adieux avec ma famille (a.k.a. mon frère qui ne se réveille pas)

en sortant de l'avion, j'étais persuadé que tout ce que je ferai pour la première fois sur ce continent aurait une signification dingue, et marquerai au fer rouge la destinée de mon année. j'ai passé les dix heures d'avion à me demander quelle chanson écouter quand j'aurai passé la douane, mais j'ai pas trouvé. d'ailleurs, j'ai vite abandonné quand j'ai vu que mon arrivée à 6:40 du matin serait accompagnée d'un magnifique 29°C sur le thermomètre du chef de cabine: il fait déjà beaucoup trop chaud.
une fois la douane passée, je me suis senti tout fébrile, comme si il ne fallait pas que je merde, que c'était la première fois que j'allais coucher avec une fille, et qu'elle allait me rire au nez si je faisais un pas de travers, avec mes deux grosses valises. puis, j'ai vu qu'ils avaient une offre promotionnelle, au duty free, il fallait que j'achète trois paquets de marlboro au prix européen pour en avoir sept gratuits. chaque parcelle de mes poumons et de mes synapses ont gueulé FUCK YEAH et j'ai plus pensé à ma métaphore bidon sur ma première fois à shanghai. donc je me suis retrouvé en face de l'aéroport, j'ai fumé une clope de force, parce qu'il faisait déjà 30°C, probablement 1000% d'humidité, et que c'était juste pour la beauté du geste. il faisait tellement chaud que j'ai renoncé à mon envie de prendre le bus pour voir la ville au fur et à mesure pendant une putain d'heure pour prendre le maglev, ce truc qui flotte dans les airs à 300km/h pour arriver à shanghai en sept minutes. les mecs ont même foutu un chronomètre pour montrer que c'est pas de l'arnaque. bam, je me tape le rush hour dans le métro, et les premiers regards braqués sur ma gueule de métèque et mes cheveux d'afro-feuj.

je sens que je traîne, et qu'à ce rythme-là, je vais devoir remplacer la première phrase par "longtemps, je me suis couché tard".

donc, voilà, pour le factuel, j'avais un voucher pour un hotel de touriste, dans une rue de touristes, et j'ai croisé des touristes au subway. c'est une grande rue piétonne avec des enseignes lumineuses partout, times square en mode groupe électrogène. ma chambre n'a pas de fenêtre, c'est cool, c'est monacal, je commence à chercher des appartements. pleins d'appels d'échec, et un ou deux qui marchent.
le premier, c'est avec deux français d'école de commerce, très gentils, très école de commerce, mais c'est trop cher et trop loin et je veux pas parler français en rentrant à la maison. cependant, comme je suis seul, je garde le contact, on boira des bières.
le deuxième, c'est avec un type de suisse allemande, le mec a les oreilles en chou fleur tellement il s'est battu, sourit tout le temps et a l'air d'un type réglo. l'appartement est tout près de la fac, rez de chaussée, crade, avec des chinois tout partout autour, et probablement autant de cafards. j'ai presque envie de le prendre.
et puis le troisième est super grand, super bien, trois colocs qui ont l'air super cools, plus vieux, dans une résidence légèrement riche, un quartier pas dégueulasse, mais pas super bien centré, loin de la fac. va pour celui-là, du moment que j'ai un chez-moi douillet, je peux bien aller partout en ville.
je suis allé à la fac, aussi, pour m'inscrire et faire des trucs, le campus est ouf, malgré les colonnes en style pseudo-grec qui synthétisent tout ce que l'architecture moderne a de plus détestable, et mes congénères ont vachement l'air de têtes de classe pas très drôles.
et je me suis baladé dans la vieille ville, la place du peuple, la concession française, le temple jing'an, mais là c'est que du factuel pour vous situer un peu, je sais bien que c'est chiant, ne vous inquiétez pas, les posts suivants seront sur la chine et les chinois, par sur les déambulations de ma petite vie personnelle.

peace.